vendredi 3 décembre 2010

Voisinage musical


Quand j’habitais au Largo do Machado à Rio de Janeiro, mon voisin jouait de la clarinette toute la journée. Il commençait tôt le matin et il n’était pas rare qu’il joue jusqu’au soir. Parfois, il passait des heures sur la même gamme, montant et descendant sans fin. De temps en temps, il s’essayait à une chanson entière. Il s’exerçait quelquefois en duo avec un flûtiste, répétant probablement pour un quelconque concert.

Les voisins de musiciens ne sont généralement pas les personnes les plus tolérantes au monde, surtout quand les instrumentistes sont encore débutants. Au cours de ma carrière d’adolescent rockeur amateur à Brasilia, j’ai eu la chance de bénéficier du soutien de mes parents, qui abandonnaient la véranda et les samedis après-midi aux répèts’ du Sendero Luminoso, illustre groupe dont j’ai fait partie, baptisé en hommage à l’organisation révolutionnaire péruvienne. Les habitants des maisons alentour y apparaissaient parfois. Au début, ils nous regardaient de travers, alors qu’on ne jouait pas encore très bien, puis ils ont commencé à assister aux réunions et même à esquisser de timides « yé yé ».

Plusieurs mois d’existence et quelques concerts plus tard, des dissidences internes, que je qualifierais de traîtrise, nous ont contraints à réduire le nom du groupe à Sendeiro, acte qui a entraîné la réprobation de certains amis mais surtout des voisins, en grande partie affiliés au parti communiste. Après quelques années de carrière et la composition de tubes inoubliables dont personne ne se souvient comme Nostradamus et A guerra e a vida, le groupe s’est séparé. Mais pas sans avoir préalablement conduit à un autre genre de répétition, ou plus exactement à quatre répétitions, l’année fatidique de 1990, quand presque tous ses membres se sont ramassés à l’école à force de donner la priorité aux longues et divertissantes répèts’ et à une campagne politique animée, au détriment d’ennuyeuses formules chimiques et autres terminologies de biologie végétale.

Le Sendeiro Luminoso de Brasilia n’a pas eu plus de succès dans sa tentative de révolutionner le rock que l’organisation péruvienne dans celle de prendre le pouvoir dans son pays. Grâce à tout le soutien que j’ai reçu mais étant surtout passionné de musique, j’ai appris non seulement à respecter les instrumentistes qui vivent à côté, mais aussi à prêter l’oreille à ce qu’ils font.

Le clarinettiste de Rio a fini par devenir un copain. Il joue aujourd’hui avec des musiciens de renom comme le guitariste Maurício Carrilho et avec le Rancho Flor do Sereno du carnaval carioca. Et si sa musique pénétrait quotidiennement dans ma chambre par la fenêtre, j’ai découvert que les répèts’ acoustiques de Phonopop, autre groupe dont j’ai fait partie et qui se réunissait dans mon appartement, résonnaient également dans son salon.

L’autre soir à Paris, j’ai décidé de sortir ma guitare du placard et de jouer à pleins tubes avec Nicolas, un ami colombien qui ressemble comme deux gouttes d’eau à Marcelo D2. Le jour suivant, au réveil, j’ai entendu au loin le doux son d’une clarinette. J’ai ouvert la porte du balcon et la mélodie a envahi mon appartement.

vendredi 8 octobre 2010

Një Peja, të lutem


Jamais je n'aurais pensé mettre les pieds au Kosovo. Vous situez le Kosovo? Le plus jeune pays du monde, même si des Etats comme le Brésil ou l'Espagne ne le reconnaissent pas. Celui qui fait les manchettes du genre : "Tensions au Kosovo", "L'OTAN bombarde Pristina" et autres choses du type.

Bien. Mais je suis pas là pour vous parler de guerres ou de processus compliqués d'indépendance. Je me paie le luxe d'écrire sur les bars, et je vais vous expliquer pourquoi.

Après le dépaysement lié à l'arrivée, j'ai pas tardé à me sentir chez moi à Pristina, la capitale. Un peu en raison de la présence d'innombrables laveurs de pare-brise aux feux rouges. Une technologie que je croyais brésilienne et qui, à ma grande surprise, est commune dans les Balkans. Mais c'est surtout parce que j'y ai déjà mon bar attitré. D'ailleurs, j'ai déjà un bar de prédilection, un portable, et un agenda plein de numéros de gens sympas, éléments qui, mélangés à bonne dose, peuvent signifier le bonheur. A trop forte dose, ils peuvent signifier cirrhose. Ou du moins un mal de crâne carabiné.

Comme si ça suffisait pas, j'ai aussi une théorie. De comptoir. On dit que les gens s'attachent fermement aux endroits quand ils y élisent leur bar préféré. J'ai le Beirute à Brasilia, le bar du Mineiro à Rio, la Liberté à Paris et maintenant le Strip Depot à Pristina. Un choix de cette ampleur marque une étape importante dans la vie sociale de tout citoyen.

Mais un individu ne se résume pas au bar qu'il choisit. Il faut pas oublier l'autre angoisse qui consume les contribuables des quatre coins du monde, du Pérou à la Croatie, du Canada à l'Ouzbékistan : le choix de sa bière favorite. J'ai déjà la mienne. Bon, les miennes. Au Brésil, Antártica Original, faz favor. En France, une Leffe, s'il vous plaît. Et au Kosovo, Peja, të lutem. Quelqu'un sans bière préférée est un éclectique du houblon. Et les éclectiques, c'est mondialement connu, sont ceux qui ne choisissent pas, que ce soit par flemme, commodité ou absence de bon sens.

Je pensais à tout ça quand, à mon troisième jour à Pristina, je retournais pour la troisième fois au Strip Depot. Je me suis assis, j'ai sorti mon cahier de notes et gribouillais quelque chose quand le serveur s'est adressé à moi. Pas en albanais, comme il le faisait d'habitude avec ses clients, mais en anglais. Il m'avait reconnu."How are you today? Is everything fine?". A ce moment-là, je me suis demandé si je buvais trop ces derniers temps. Je me suis demandé si j'avais pris la bonne direction, plutôt que d'aller à l'hôtel finir un boulot. Je me suis aussi demandé si cette mousse, tôt ou tard (plus tôt que tard, probablement), ne finirait pas par se fixer au niveau de ma région abdominale, formant d'inévitables bouées. En un tour de passe-passe, j'ai balayé toutes ces questions en prononçant la bonne phrase, dirigée à la bonne personne :

- Yes, everything is ok. Can I have a Peja, të lutem?

vendredi 18 juin 2010

Zidane x moi


C'était mon premier samedi à Paris, et ma première fête aussi. Je suis arrivé en retard, après une journée (d’enfer) chez Ikea à acheter des trucs pour la maison.

A l’arrivée, surprise : les haut-parleurs diffusaient de la musique brésilienne ! “Essa moça tá diferente, já não me conhece mais...” et les Français, qui adorent cette chanson, esquissaient quelques pas de samba des plus bizarres. Puis vint O que será ? Je me suis tout de suite senti chez moi.

A l’extérieur, il faisait un froid de gueux. Mais une chaleur torride dans le grand appartement. Si chaud que j’ai dû enlever manteau, pull, écharpe et gants, attirail habituel ici, mais si peu naturel pour nous autres Brésiliens.

Bien. Ma pratique du français n’était pas fameuse mais je pouvais quand même échanger quelques mots à gauche et à droite. J’ai été présenté aux gens.

- Voilà les propriétaires.
- Enchanté.
- Voilà mes copains.
- Enchanté.
- Voilà les copains qui vivent au Sénégal.
- Enchanté.

Enchanté par ci, une petite gorgée de bière, enchanté par là, re gorgée de bière. Musique brésilienne en fond sonore. J’étais super à l’aise.

Puis j’ai été présenté à un type dont je ne me souviens plus de la tête. Je me souviens juste de son t-shirt.

- C’est Daniel. Il vient du Brésil. Et lui, à l’image de Clark Kent, a ouvert sa chemise et m’a révélé sa vraie identité.

- Regarde - et il m’a montré la photo de Zidane qu’il arborait fièrement tout en adoptant une pose cynique.

Absolument! Le Zidane qui a marqué deux buts de la tête en 1998 et a lobé Ronaldo en 2006. Celui qui nous a infligé les deux dernières défaites en Coupe du monde et qui, en finale, a perdu la tête. Ou plus exactement s’est fait un plaisir de l’enfoncer dans le torse du défenseur italien Materazzi.

C’en était trop. Les défaites de mon équipe, la journée infernale chez Ikea, mes origines italiennes et aussi l’excès de bière; tout a joué! J’ai pensé qu’il fallait que je fasse quelque chose. Et je l’ai fait.

Au moment où le mec a exhibé son t-shirt, j’ai compris que l’orgueil national se jouait ici, à ce moment précis. C’était un défi, une provocation en duel. Et l’heure de la revanche.

J’ai senti le poids de la responsabilité. 190 millions de Brésiliens et 60 millions d’Italiens attendaient de moi une réaction immédiate.

J’ai respiré profondément et, imitant le milieu offensif français, j’ai donné un coup de tête dans le torse du type, un peu plus fort que prévu.

Je méritais un carton rouge, mais je n’ai réussi qu’à rire jaune.

- Pardon.

Le lendemain je me suis réveillé avec un mal de crâne terrible.

vendredi 16 avril 2010

Pour mettre la balle au fond


Un jour, le téléphone sonne.

- Daniel, tu fais quoi mercredi prochain vers 15 heures ?

Comme tous ceux qui ont plein de temps libre, j’ai toujours l’impression d’en manquer.

- Mercredi ? J'vais chez le dentiste.
- Mais tu m’avais dit que c’était vendredi.
- Ben oui, mais la préparation psychologique commence le mercredi.
- Bon, ben tant pis. Je vais trouver quelqu’un d’autre pour la partie avec Chico Buarque.

Ca a fait "tilt" dans ma tête, puis "boing" et enfin "wizz". J’ai cru que je pétais les plombs.

- Quoiquoiquoiquoiquoi? Un foot avec Chico Buarque?
- Ouais, le match dont je t’avais parlé, y a une place de libre. Mais c’est pas grave, je vais appeler...
- Tatatatata, tu vas appeler personne, pas la peine. Mercredi, j’y serai.

C'est seulement à ce moment-là je me suis souvenu que ca faisait bien 8 ans que j'avais pas touché un ballon. Depuis que Felipão avait commis deux injustices et n’avait sélectionné ni Romário ni moi pour la Coupe du Monde 2002. J’avais alors décidé de raccrocher mes crampons et de m’essayer à des sports moins frustrants, comme la course de pigeon et le lancer de thon.

Bien. Le mercredi, à l’heure et à l’endroit indiqués, il y avait déjà quelques joueurs mais pas de trace de Chico. Je me suis dit qu’il devait arriver en hélico, comme le père Noël au Maracana. Ou alors escorté de motards arrêtant la circulation pour le laisser passer, ou en bateau sur...
Au beau milieu de mes divagations, quelqu’un me tape sur l’épaule et me présente un type en short et crampons, prêt à jouer.

- Daniel Cariello, Chico Buarque. Chico Buarque, Daniel Cariello.


J’avais pensé à plein de choses à dire à ce moment-là, imaginant toutes les éventualités. J’avais préparé des blagues, des phrases intelligentes, une position blasée, des citations de Platon et tout le tremblement. L’une d’elles, la bonne, sortirait toute seule au moment des présentations. J’avais tout prévu, sauf ça, et j’ai fini par dire la chose la plus idiote qui soit.

- Chico Buarque ? Je crois que j’ai déjà entendu parler de toi...

Quel imbécile, je me suis dit. Mais quel crétin !

Alors que je me remettais de mes émotions, les équipes se sont formées, six joueurs de chaque côté, et on s’est retrouvés dans des camps opposés. Quelqu’un a tout de suite passé le ballon à Chico, qui est arrivé dans ma direction.

- Vas-y Daniel.
- Moi ? Et je fais quoi ?
- Marque-le.
- Quoi ? Mais j’ai le droit ?

Je l’avais. J’y suis allé et j’ai pris la balle.

- Pardon, j’ai pas fait exprès.


Je sais pas si c’était pour me punir des bêtises que j’avais racontées, mais il attaquait toujours de mon côté. Je devais lui coller à la culotte, c’était mon rôle. Et si je faisais une approche plus agressive ? Je voyais déjà les titres des journaux - de tous les journaux – le lendemain : “ Le champion du monde de la bêtise blesse Chico Buarque en jouant au foot. Le musicien ne pourra plus jamais jouer de la guitare.”

Mentant ostensiblement puisque je joue toujours aussi mal, quelle que soit ma position, je propose alors à un des membres de mon équipe :

- Et si on tournait, tu te mets à droite et moi à gauche. Je joue mieux de l’autre côté.

Je pensais que la partie ne durerait pas plus de 30 à 40 minutes et j’ai couru comme un dératé. Certains ont même loué ma capacité à me démarquer, sans se douter le moins du monde que c’était le ballon que je fuyais. Et pourtant, il finissait immanquablement entre mes jambes. Il finissait littéralement, car toute possibilité d’action prenait fin à cet endroit.

Une heure vingt était passée et toujours pas de fin à l'horizon. Alors que Chico Buarque courait comme une gazelle, je n’avais même plus la force de tenir debout. Malgré ma présence, nous menions largement : 5 à 4.

- On arrête quand ? j’ai demandé.
- Quand c’est nous qui gagnerons, a répondu quelqu’un de l’autre équipe.

Ca m’a semblé honnête et j’ai réuni mes dernières forces pour “donner le meilleur de moi-même pour aider l’équipe”. Leur équipe, en l’occurrence. Et Chico a égalisé sans tarder.

- On arrête, non ? a t-il suggéré. Personne n’a dit le contraire.

Ouf! L’invincibilité de Paristheama, le pendant français de Politheama, était assurée. Si ma place dans l’équipe l’est aussi, je ferai mon possible pour qu’il en soit toujours ainsi, quel que soit mon camp.

vendredi 2 avril 2010

Le sourire de monsieur Charles


Un jour, Charles Lutwidge Dodgson arrive à la maison et annonce à sa mère :

- Maman, faut que je te parle.
- Qu’est-ce-que t’as fabriqué cette fois, Charles?
- J’ai décidé de faire un truc différent, j’en ai mare de la monotonie.
- Mon fils, tu te souviens de la dernière fois que t’as essayé une chose pareille?
- Oui, maman. Mais ce qui est arrivé n’était pas de ma faute. J’étais persuadé qu’on pouvait voir ce qu'il y avait de l’autre côté du miroir.
- Je comprends. Mais tu n’aurais pas dû forcer ton cousin Jérémy à le traverser. Le pauvre bougre s’est esquinté la figure.
- La science, maman, a besoin de volontaires. Au moins on a découvert que ça n'était pas possible pour l’instant…
- Dis-moi, alors, ce que tu voulais me raconter.
- J’ai laissé tomber la poésie.
- Ah, finalement un peu de bon sens. La poésie, ça mène nulle part. Regarde tes amis Edgar Allan Poe et Walt Whitman. Qui les connaît ? Qu’est-ce-qu’ils ont fait d’important dans leur vie ?
- Maman…
- Maintenant tu pourras te dédier exclusivement aux mathématiques. Je suis fière de toi.
- Maman, c’est exactement de ça que je veux te parler.
- Tu vas lancer un nouveau livre sur les théories d’Euclide?
- Non, j’ai aussi laissé tomber les maths.
- Quoi ? T’es devenu dingue ? C’est à dire, encore plus qu’avant ?
- Je viens d’écrire un livre sur une petite fille appelée Alice.
- Ouf. C’est pas si dramatique. Dis m’en plus.
- Il y a cette enfant qui marche dans les bois puis un lapin blanc apparaît.
- Que c’est joli. Une fable, comme celles de La Fontaine?
- Pas tout à fait. Le lapin a une montre à gousset.
- Une montre ?
- Mais il est toujours en retard.
- C’est un lapin ou un brésilien ?
- Alice le suit jusqu’à l'entrée d'un gros trou. Elle y tombe. Au fond, il y a une porte, trop petite pour elle. Alice décide de boire dans un verre sur lequel il est inscrit “bois-moi”. Elle devient minuscule, ayant la taille parfaite pour passer par la porte, mais elle est toujours malheureuse parce qu’elle n'a pas pensé à prendre la clé de la porte sur la table. Du coup, elle mange du gâteau qui est à côté d'elle, par terre, sur lequel elle peut lire “mange-moi” et là, elle se transforme en géante.
- Charles, t’as pris quoi ce matin ? T’as dû manger des œufs périmés. On va aller voir le médecin tout de suite. Tu vas pas bien, ça se voit.
- Attends, maman, c'est pas fini. Alice rentre dans un nouveau monde. Je l’ai appelé le pays des merveilles.
- Le pays des merveilles ?
- Oui.
- Un endroit où tout est merveilleux ?
- Exactement.
- Il n’y a plus de portes minuscules ?
- Non.
- Ni de gâteaux qui font grandir ?
- Tu parles de Haribo ?
- Quoi ?
- Laisse tomber. Pour comprendre ma blague il aurait fallu que tu sois née en France, au XXè siècle.
- Et dans ce pays des merveilles, il y a quoi ?
- Des choses simples. Un chapelier qui boit du thé tout le temps et fête les non-anniversaires, les frères Tweedeldee et Tweedeldum, qui contredisent Alice sans arrêt , le chat du Cheshire et son sourire énigmatique, la Reine de Cœur et son désir de couper la tête à tout le monde.
- Mais que t'est-il arrivé, mon Charles ?
- J’ai oublié de te dire, maman. Désormais, on m’appelle Lewis Carroll.
- Lewis Carroll?
- Calme-toi, maman. Je vais aller te chercher du thé.
- …
- Maman, maman! Reviens, j’ai pas terminé… Elle est devenue folle, on dirait.

Le texte ci-dessus a été originellement publié dans la revue culturelle des étudiants du master 2 Journalisme culturel à la Sorbonne Nouvelle. Je l'ai, ici, un tout petit peu modifié.

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vendredi 12 mars 2010

Haikais pueris


Ventre
A Paris, France,
Une femme
Grossit de la panse

Parole
Du ventre de cette mère
Un bébé
Parle à son père

Visage
Le visage de ce bébé
C'est mon,
Ou bien ton portrait ?

Mouvements
Le ventre l'enfant appuie
Dans le lit la maman remue
Le papa a fini sa nuit

Désirs
Ananas, café au lait, croissant
Serait-ce la liste d'hier
Ou celle de demain?

Out
Vu d'ici
Dans ce ventre
Y a quelqu'un qui vit

In
Dedans
Il n'y a pas, j'imagine,
Beaucoup de mouvements

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vendredi 26 février 2010

Tremblements de ventre


I.
- Il bouge. Mets ta main.
- Ici ?
- Non, de l’autre côté.
- Ici ?
- Maintenant c’est de l’autre côté.
- Ici ?
- Il est retourné où il était avant.
- Ici ?
- On dirait qu’il a arrêté…
- Il s’est vraiment calmé ?
- Vraiment.
- Bon, je vais dans le salon. Appelle-moi quand il recommence.
- Reviens, reviens. Mets ta main.
- Ici ?
- Oh, il s’est encore arrêté.

II.
- Regarde mon ventre.
- Ça bouge.
- Ça monte, ça descend, y a tout qui frémit.
- Un véritable tremblement de ventre.
- Y a peut-être une fête à l’intérieur.
- Peut-être. Je vais m’occuper de l’animation musicale.
- Comment ?
- En chantant tout près de ton ventre.
- T’es sûr ?
- Une souris verte, qui courait dans l’herbe, je l’attrape par la queue, je la montre à ces messieurs…
- Il bouge plus.
- Ça doit être une révolte contre les mauvais traitements faits aux animaux.
- Ou contre les mauvais chanteurs, qui sait ?

III.
- Mets ta main.
- Où ?
- Juste là.
- Ça va pas lui faire mal ?
- Non. Vas-y.
- Ouh la..
- T’as senti ?
- Oui. Beau shoot.
- C’était fort, hein ?
- Un tir de première catégorie. Quand il sera grand il jouera à l’OM.
- Et si c’est une fille ?
- Ben elle jouera dans l’équipe féminine pardi.
- Mais elle pourra toujours faire autre chose si elle préfère.
- Avec un coup de pied comme celui-là ? Ça serait dommage…

vendredi 29 janvier 2010

Malade comme un chien


Une amie brésilienne m’a demandé d’acheter pour son chien un médicament qui n’existe qu’en France. J’ai essayé.

- Bonjour, je voudrais ce médicament s’il vous plaît.
- C’est un médicament pour chien.
- Oui, je sais.
- Et il est où ?
- Il n’a pas pu venir mais il m’a laissé sa carte bleue.
- Et comment savoir s’il est vraiment malade ?
- Vous pouvez l’appeler. Si vous entendez un long aboiement, c’est qu’il est grippé. Deux aboiements enroués peuvent indiquer une crise d’asthme. Mais si vous n’entendez rien, peut-être est-il déjà mort.
- Quelle horreur !
- C’est vrai. Mais vous pouvez l’éviter en me vendant le médicament que je vous ai demandé.
- Peut-être est-ce un problème alimentaire. Qu’est ce qu’il mange ?
- Quand ses maîtres ne sont pas là, des charentaises aux fils électriques.
- Et quand ils y sont ?
- Dans ce cas des croquettes, allégées de préférence vu qu’il s’est mis en tête de garder la ligne.
- Et ses habitudes ? Il sort beaucoup ?
- Juste dans les alentours. Le pauvre chéri a raté son permis.
- Vu d’ici il a l’air normal.
- Il est normal, madame. Tout à fait normal. Il a juste besoin de ce médicament.
- Je suis désolée, pour ça il aurait fallu qu’il fasse le déplacement.
- Pas possible, madame. Il est au Brésil.
- Ah bon ? Au Brésil ?
- Exactement. Brésil, samba, Pelé.
- Julio Iglesias ?
- Celui-là on l’a expulsé vers l’Espagne encore enfant.
- Il faut l’amener ici.
- Qui ça, Julio Iglesias ?
- Le chien.
- Au fond, c’est pareil.
- Pardon ?
- Laissez tomber. Qu’est ce qu’on peut faire alors ?
- Rien. C’est impossible.
- Et si j’aboyais un peu, ça marcherait ?
- Non.
- Et si je sortais un peu la langue, comme ça ?
- Non plus.
- Avec trois ou quatre puces faisant des sauts sur ma tête, vous me le vendez ?
- Hum, à tout bien y réfléchir…
- Non madame, inutile de regarder le lampadaire là-bas dehors.
- Partez pas, je vais vous donner un no-nos.